Les deux principales organisations juives britanniques -le Board of Deputies et l’Anglo-Jewish Association - s'opposent dès 1917 au projet sioniste soumis par Lord Balfour
Les demandes actuelles vont beaucoup plus loin. Elles font partie intégrante d’une conception sioniste
plus vaste, qui considère toutes les collectivités juives du monde comme constituant une nationalité
sans patrie, incapable de s’assimiler intégralement, tant au point de vue social que politique, aux
nations au milieu desquelles elles vivent ; on prétend qu’il faut à cette nation sans patrie un centre
politique et une patrie effective en Palestine.
Le Comité s’élève avec force contre une pareille théorie. Les Juifs se considèrent avant tout comme
une communauté religieuse ; Ils ont toujours appuyé leurs revendications en vue de l’égalité des droits
politiques sur cette conception et sur son corollaire, à savoir qu’ils n’ont pas d’aspirations nationales au
sens politique du mot. Ils estiment que le Judaïsme est une doctrine religieuse, qui n’a rien de commun
avec leur statut politique, et ils affirment à nouveau que, citoyens des pays dans lesquels ils sont fixés,
ils se sont assimilés intégralement et en toute sincérité l’esprit national et les intérêts de ces pays. Il s’ensuit que l’établissement en Palestine d’une nationalité juive fondée sur la théorie de l’absence de toute patrie pour les Juifs aurait pour conséquence de faire considérer les Juifs comme des étrangers dans leurs pays d’origine, et de compromettre leur situation péniblement acquise de citoyens et de nationaux de ces pays. Bien plus, une nationalité juive politique, poussée à sa conclusion logique, constituerait dans l’état actuel du monde un véritable anachronisme.
Le seul critère certain d’un Juif étant la religion juive, une nationalité juive devrait nécessairement se fonder sur la base de la religion
et être limitée à elle. On ne saurait admettre un instant qu’un groupement quelconque de Juifs puisse
aspirer à un état constitué sur une base religieuse et limité aux questions de liberté de conscience.
Cependant une nationalité religieuse peut-elle avoir quelque autre formule politique ? La seule
alternative serait l’établissement d’une nationalité juive temporelle, établie sur quelques vagues
principes de race et de particularités ethnographiques ; mais une nation ainsi conçue ne serait pas juive au sens spirituel du mot ; son établissement en Palestine serait la négation de tout idéal, de toutes les espérances par quoi la restauration de la vie juive en ce pays se recommande à la conscience et à la sympathie du Judaïsme. C’est pour ces raisons que le Comité repousse de la façon la plus énergique les propositions nationales des Sionistes. »
In The Times of London, 24 mai 1917
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